Le Français s’impose dans La Mecque britannique.
Le Français Nicolas Touzaint, en selle sur Hidalgo de l'Ile, a remporté le concours complet d'équitation de Badminton, une première pour un Français depuis 1949, dimanche, devant les Britanniques Lucy Wiegersma et William Fox-Pitt.
Rappelons que Nicolas Touzaint est champion d'Europe en titre.
Il s’agit de la victoire française la plus éclatante de ce week-end. A Nicolas Touzaint les lauriers du classicisme. Le cavalier angevin, en remportant hier le concours complet international (CCI) de Badminton, en Angleterre, assoit une éclatante souveraineté sur cette discipline (dressage, cross et saut d’obstacles), à trois mois des JO qui se dérouleront à Hongkong pour les épreuves d’équitation. Après avoir patiemment amené son succès, Touzaint devient le premier cavalier français à remporter cette épreuve, où un seul Européen continental s’était imposé avant lui : le Suisse Schwarzenbach en 1951.
«Superlatifs».Rien de plus achevé pour un cavalier que de remporter ce concours complet, créé en 1949, qui passe pour le plus remarquable de tous : «Gagner Badminton, pour un cavalier, c’est comme remporter à la fois Roland-Garros et Wimbledon pour un tennisman. C’est le concours de tous les superlatifs : le plus redouté, le plus difficile, le plus regardé, puisque près de 300 000 spectateurs se massent le jour de l’épreuve de cross», explique Michel Asseray, juge français.
Touzaint a justement construit sa victoire dans l’épreuve de cross sur Hidalgo de l’Ile, qui n’est pourtant pas son meilleur cheval : «La chance de Nicolas, c’est de pouvoir disposer de trois chevaux performants», assurait avant l’épreuve Thierry Touzaint, oncle et entraîneur national. Neuvième après le dressage, Touzaint s’est installé en tête après le cross qui aura vu chuter deux de ses rivaux : Andrew Hoy, l’Australien vainqueur en 2006, et la Britannique Ruth Edge, premier et deuxième à l’issue de l’épreuve du dressage, qui se déroule sous l’autorité de trois juges. Dans la troisième épreuve, le saut d’obstacles, hier, Touzaint, qui ne disposait pas, précise Michel Asseray, de son «cheval numéro 1, Galan de Sauvagère [qu’il montera aux JO, ndlr]», n’a fait tomber qu’une barre pour seulement quatre petits points de pénalité.
Nicolas Touzaint a construit hier une œuvre forte. Non pas simplement parce que le couple homme-cheval a battu les Anglais dans «leur propre Mecque du sport équestre», comme le dit Michel Asseray, mais parce que Touzaint s’impose de manière très nette comme le cavalier français le plus en vue pour un podium olympique. Touzaint en selle, c’est la souplesse du talent. A ce propos, on met toujours un peu de soi dans son chef-d’œuvre. Touzaint a fondu en larmes, «comme un gamin de 15 ans», à la remise du prix. «Il ne pouvait plus s’arrêter de pleurer. Il faut juste comprendre que, pour un cavalier, remporter Badminton c’est quelque chose qui marque une vie. Surtout pour un Français… Il y a vingt ans, pour nous, cavaliers français, c’était un rêve totalement inaccessible. C’est dire si nous avons progressé. Je me disais avant l’épreuve que, si on plaçait un de nos cavaliers parmi les cinq premiers, on pourrait parler d’exploit. Nicolas a exaucé le rêve de tous les cavaliers français», expliquait Thierry Touzaint, joint hier soir à Badminton, «sous l’orage».
«Aura».Nicolas Touzaint devient de fait l’un des immenses favoris pour les JO. Pour Thierry Touzaint, ce n’est pas une surprise : «Il est déjà double champion d’Europe et ce statut ne lui pesait pas. Il s’affirme comme un prétendant au titre olympique. Gagner Badminton lui donne encore plus d’aura, car les juges sur l’épreuve de dressage portent un regard flatteur sur le vainqueur de Badminton.»
On se fait parfois des idées sur cette discipline. On imagine que les cavaliers, une fois descendus de monture, se prélassent dans des fauteuils Voltaire. Pas du tout. Touzaint, une heure et demie après son sacre, prenait le volant de son camion. Le ferry à Douvres. Puis Calais. Dix heures de route et Saumur ce matin. Cavalier le jour et routier la nuit. On dirait une plaisanterie, mais il s’agit indéniablement d’une performance de toute beauté.